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Is 35, 1-6a.10
Ps 145
Jc 5, 7-10
Mt 11, 2-11

« Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? ». La question posée à Jésus par Jean-Baptiste me semble encore d’actualité. Mais situons la d’abord dans le contexte de l’époque. Le Baptiste nous a été présenté dimanche dernier comme un original vivant à l’écart de la bonne société, vêtu de poils de chameau et se nourrissant de sauterelles et de miel, mais surtout comme un prophète appelant à un changement de vie pour éviter une catastrophe imminente. Flavius Josèphe, un historien juif de la fin du premier siècle, écrit à son sujet : « Homme de haute qualité, il exhortait les Juifs à pratiquer vertu, justice et piété, les conviait à un baptême après s’être rendus agréables à Dieu non seulement en se détournant du péché, mais en joignant la pureté du corps à celle de l’âme ». Un beau compliment, qui va dans le même sens que les paroles de Jésus : « Jean est plus qu’un prophète, parmi ceux qui sont nés d’une femme, aucun n’est plus grand que lui ».

Mais voilà que Jean est enfermé. Il a eu le tort de reprocher au roi Hérode son divorce et son remariage avec la femme de son frère. Dans sa captivité, il s’interroge et s’impatiente. En prison, une heure est comme un siècle. Il envoie des disciples demander à Jésus s’il est bien le Messie tant espéré, qui va remettre de l’ordre dans le pays ; il s’impatiente. Peut-être avons-nous dans ce passage d’évangile un écho assourdi d’une divergence, à un certain moment, entre les disciples de Jean et ceux de Jésus ? Lequel est le Sauveur, puisque tous deux sont morts et que rien ne change ?…

Revenons à l’actualité. Des dirigeants n’hésitent pas à mettre en prison ou à liquider des opposants, au Congo, en Turquie, à Cuba, en Russie, j’en passe… Des gens souffrent, perdent courage, votent sur des coups de tête, recourent à la violence… Les partisans de l’un ou l’autre leader prétendent que leur chef va tout résoudre, changer le système, et puis ?…

Le comportement de Jésus ne correspond pas à ce que le Baptiste, et nous, nous attendons le plus souvent. Le Christ n’est pas un justicier impitoyable, il n’est pas un messie révolutionnaire ni un libérateur politique, il ne répond pas à nos besoins de merveilleux, de puissance, de certitude absolue. Il montre un Dieu de miséricorde, qui se met à table avec les pécheurs, qui guérit des malades, qui se tourne d’abord vers les pauvres…

Jean-Baptiste avait cité le prophète Isaïe en appelant à préparer les chemins du Seigneur. Jésus cite le même prophète en montrant ce qui se passe : c’est l’allégresse et la joie pour les simples, des aveugles retrouvent la vue, des boiteux marchent, les pauvres reçoivent la bonne nouvelle. « Heureux, ajoute-t-il, celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute ». Etonnante béatitude, énoncée en négatif : avancera celui qui ne se découragera pas, qui ne perdra pas la confiance et la persévérance si les choses ne se passent pas comme il l’avait rêvé, celui qui ne se trompera pas de Messie – car le Messie, c’est un bébé sur la paille, c’est un prophète sur la croix.

Les poètes d’Israël, dans les psaumes, avaient déjà entrevu les temps messianiques : « le Seigneur fait justice aux opprimés, il délie les enchaînés, il aime les justes, il protège l’étranger… » Quel est le candidat qui oserait mettre ceci à son programme pour 2017, en ces temps de migration et de pauvreté accrue pour les deux tiers des humains ?

Patience et endurance, répond saint Jacques : regardez le cultivateur. Il sait qu’il faut du temps pour que germe le blé et que tirer les jeunes pousses vers le haut ne les fera pas grandir. « Ne gémissez pas les uns contre les autres » écrit-il encore. Dommage que notre lecture s’arrête là, car il ajoute au verset suivant : « nous proclamons heureux ceux qui tiennent bon »…

Tenir bon, dans la confiance et la patience, avec détermination, comme le cultivateur qui croit aux fruits de son travail. Tel est le bonheur du disciple de Jésus, qui a confiance et patience dans le travail pour la justice, pour la liberté, pour l’accueil de l’étranger, pour la joie des pauvres. C’est aussi le sens de l’action ‘Vivre Ensemble’ et du don que nous allons faire pour la soutenir. Car la pauvreté, chez nous et dans le monde, n’est pas près de disparaître de l’actualité. Et la Bonne Nouvelle doit être annoncée. Faut-il attendre un autre Sauveur ?

Abbé René Rouschop

© 2016 - Monastère Saint-Remacle de Wavreumont

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