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Comme nous venons de l’entendre : un homme aveugle de naissance ouvre les yeux pour la première fois grâce au geste de Jésus sur lui. Les disciples en sont les premiers étonnés. Comment cela peut-il se faire ? Les disciples qui suivent pourtant Jésus expriment leur étonnement et donc aussi leur aveuglement.

Toute relation commence souvent par le regard, Emmanuel, un ami de la communauté et prêtre à Bruxelles a perdu la vue à la fin de son séminaire. En parlant avec lui, on découvre vite que même s’il est privé du regard, cela ne l’empêche pas d’être un visionnaire et d’ouvrir les yeux des soi-disant voyants que nous sommes, à des réalités inconnues.

Pour un nouveau-né, son regard mettra un certain temps à s’ouvrir. N’est-ce pas par le regard de sa mère et de ses proches que le nouveau-né va ouvrir les yeux progressivement pour découvrir la lumière et le monde qui l’entoure ?

Quand Jésus nous dit dans le texte que tant qu’il est dans le monde, il est la lumière du monde ; il veut dire par là que sa lumière est destinée à tous.

Dimanche dernier, la femme au bord du puits avait d’abord gardé les yeux fermés sur la réalité dont lui parlait Jésus: avec quoi prendrais-tu l’eau vive? disait-elle. Il lui a fallu tout un temps et un beau dialogue avec lui pour ouvrir son regard et passer d’un besoin fonctionnel à la réalité nouvelle que Jésus lui indiquait, et découvrir à la fin que l’eau vive dont parlait Jésus, ne se puisait pas avec un seau!

Le regard comme l’écoute peuvent se limiter aux apparences extérieures et spectaculaires, mais aussi bien l’écoute que le regard peut nous donner de rencontrer l’autre en vérité. Le carême est aussi un temps pour convertir nos manières d’écouter et de regarder.

Nous avons la chance d’habiter une région où quand il fait beau, nous pouvons observer la nature se renouveler sans cesse, mais avons-nous déjà observé un arbre ? Comment la lumière nous montre des couleurs bien différentes à chaque heure de la journée et même de la nuit avec la lune. C’est la même chose pour le visage d’une personne qui se révélera à chaque moment différent en fonction de la lumière qui l’habitera et dont il rayonnera.

Le carême est un temps d’éveil et de confiance dans la vie qui nous est donnée. Il ne s’agit pas de nous réveiller comme si nous avions toujours été endormis ! Le carême est un moment favorable pour découvrir un monde qui nous était jusque là interdit. Tout est nouveau pour celui qui ouvre les yeux pour la première fois.

Au début du passage de l’évangile, Jésus rencontrait un homme qui était aveugle de naissance (remarquez qu’on ne parle pas d’un aveugle, mais d’un homme qui était aveugle). À ce moment, les pharisiens, eux, croyaient être dans la pleine lumière puisqu’ils se permettaient d’avoir leur jugement sur les actions de Jésus: « Celui-là ne vient pas de Dieu, car il n’observe pas le repos du sabbat » disaient-ils. Et à la fin du texte, alors que l’homme aveugle a ouvert les yeux, les pharisiens se demandent s’ils ne sont pas aveugles eux aussi…

Le chemin de foi n’est-il pas d’accepter que nous sommes encore dans le brouillard sans pouvoir distinguer clairement les contours de celui que nous suivons? Mais comme dans le brouillard, c’est en marchant et en faisant confiance que nous découvrons progressivement la route à suivre.

Demandons à Dieu qu’il nous donne de voir les signes de son amour ici-bas. C’est en nous regardant les uns les autres que Dieu nous permet d’ouvrir nos yeux et de trouver notre chemin dans le désert de la vie. Même dans le noir ou le brouillard, rien ne peut nous décourager car nous ne sommes jamais seuls.

Et dans toute réalité, si obscure qu’elle soit, il y a toujours un espace lumineux que rien ne pourra éteindre !

Fr. Pierre Gabriel

Lectures de la messe :
1 S 16, 1b.6-7.10-13a
Ps 22 (23), 1-2ab, 2c-3, 4, 5, 6
Ep 5, 8-14
Jn 9, 1-4

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