Pentecote_2

« Les disciples avaient verrouillés les portes car ils avaient peur ». Et voici que soudain la venue de l’Esprit va tout changer. Ils sortent, libérés de toute crainte, ne cessant de proclamer les merveilles de Dieu. Que s’est-il-passé ? Qu’ont-ils vécu comme expérience ? L’oraison du début de la messe parle du « mystère de la Pentecôte ». Mais comment parler de cette expérience spirituelle, de cet évènement fondateur et mystérieux, sinon avec des images et des symboles !

Pour en rendre compte, nous venons d’entendre deux récits bien différents. Dans l’évangile, Jésus souffle sur ses disciples. Comme Dieu souffla sur Adam pour modeler l’homme, de même Jésus souffle sur les siens. C’est une nouvelle création qui commence. En répandant sur eux son souffle, Jésus leur communique son Esprit, ce même souffle divin qui a été insufflé en chacun et chacune d’entre nous le jour de notre baptême et de notre confirmation.

Ce geste du ressuscité est précédé d’une parole : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. » Si l’Esprit-Saint est donné c’est pour une mission. Non pas simplement pour remplir une fonction dans l’Église ou un service qui nous serait demandé, mais envoyés pour une mission. La mission est quelque chose qui nait du profond de notre être, elle est un appel intérieur, fruit du travail de l’Esprit en nous. Chacun doit découvrir sa mission. Elle est à discerner pour chacun, à chaque étape de son existence, car l’Esprit souffle où il veut, nous ne savons ni d’où il vient, ni où il va. L’Esprit est un dynamisme qui nous met en mouvement et nous ne vérifierons sa présence que dans la mesure où nous nous mettons en route, en faisant confiance à ce qu’il a suscité en nous.

Le récit de la venue de l’Esprit, tel que le livre des Actes le raconte, est fort différent. Ici, il semble qu’il ne s’agit plus seulement des 12 mais d’un cercle plus large avec notamment quelques femmes et la Vierge Marie, ceux et celles qui étaient réunis tous ensemble au Cénacle. Saint Luc parle de langues de feu : « Ils virent apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues et qui se posa sur chacun d’eux. Alors ils furent tous remplis de l’Esprit-Saint ». Il s’agit d’un même souffle, plus exactement d’un même souffle de feu, mais qui se divise, une part pour chacun. Chacun a reçu une partie limitée et adaptée, mais puisque cette part provient du même Esprit, tout le monde peut se comprendre.

Pourtant, si chacun a reçu sa propre part, il n’a pas reçu l’entièreté du souffle de l’Esprit. Seule l’Église réunie a reçu la totalité de l’Esprit. C’est pourquoi, nous le constatons aujourd´hui, l’Église proclame l’évangile en toutes les langues. La Pentecôte ne restaure pas un langage unique comme le voulaient les constructeurs de la tour de Babel. Le miracle de la Pentecôte c’est l’harmonie malgré la diversité, c’est le fait que l’Esprit, au sein de l’humanité, permet de vivre la communion en parlant toutes les langues. C’est la pluralité opposée à toute idéologie totalitaire qui voudrait soumettre l’humanité à une pensée unique. L’Esprit peut habiter toutes les cultures pour faire entendre les merveilles de Dieu.

Dans la deuxième lecture, Saint Paul insistait aussi sur cette communion dans la diversité : « les dons de la grâce sont variés mais c’est toujours le même Esprit ». Chacun, chacune d’entre nous a reçu un don particulier pour manifester l’Esprit mais c’est en vue du bien de tous.

Aujourd’hui, bien des chrétiens ont oublié ou n’ont pas conscience qu’ils ont reçu la grâce de l’Esprit-Saint, le jour de leur baptême. Beaucoup croient en Jésus-Christ et le prient, mais ne pensent pas à faire appel à l’Esprit-Saint ; beaucoup observent les préceptes de l’Église, mais ne prêtent pas attention aux intuitions de l’Esprit dans leur cœur. Peut-être, pensons-nous que l’Esprit-Saint ne nous a pas visités et que nous sommes toujours en train de l’espérer. C’est pourquoi, nous avons besoin les uns des autres pour nous rappeler que nous avons reçu une flamme de feu, pour nous révéler que nous aussi sommes porteurs de l’Esprit. Et ce peut être un inconnu qui nous révèle un jour la lumière intérieure qui nous habite.

Il est important de refléter aux autres, dans leur propre langue, les merveilles que Dieu réalise dans leur vie, dans la vie de leur famille, de leur communauté, de leur peuple. Peut-être, serait-ce d’abord cela notre mission d’évangélisation ? Découvrir et mettre en lumière les traces du feu de l’Esprit-Saint dans l’existence de ceux qui nous entourent ou qui nous visitent. La beauté de la Pentecôte se manifeste quand, dans nos communautés chrétiennes, chacun, chacune peut mettre en commun la part de feu qui lui a été attribuée.

Cette fête est un moment privilégié pour prendre conscience de la présence de l’Esprit-Saint et de son action discrète, mais toujours créatrice. Nous ne pourrons répondre aux défis des situations nouvelles d’un monde et d’une Église en plein bouleversement que si nous sommes animés par l’Esprit de Pentecôte. Un Esprit qui n’est pas de peur et de repli mais d’ouverture à une communion toujours plus large, au-delà des différences et des exclusions. Aussi demandons-nous : par quel souffle nous laissons-nous influencer, animer et emporter ?

Fr. Bernard de Briey

Lectures de la messe :
Gn 11, 1-9
Ps 103 (104), 1-2a, 24.35c, 27-28 , 29bc-30
Rm 8, 22-27
Jn 7, 37-39

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