RETRANSMISSION OF OSS102 TO PROVIDE DIFFERENT CROP - In this photo provided by the Vatican paper L'Osservatore Romano Tuesday, Jan. 7, 2014, Pope Francis is placed a lamb around his neck as he visits a living nativity scene staged at the St. Alfonso Maria de' Liguori parish church, in the outskirts of Rome, Monday, Jan. 6, 2014. The Epiphany day, is a joyous day for Catholics in which they recall the journey of the Three Kings, or Magi, to pay homage to Baby Jesus. (AP Photo/Osservatore Romano, ho)

Chers frères et sœurs,
L’image du berger protecteur de son troupeau est très ancienne et est enracinée dans l’expérience des peuples
nomades de l’Orient ancien. Le pasteur est un homme fort, capable de défendre son troupeau contre les
bêtes sauvages, mais il est délicat et connaît ses brebis et leurs besoins. Déjà en Babylonie ou Assyrie, les
rois se considéraient volontiers comme des pasteurs auxquels la divinité avait confié la tâche de prendre soin
de leur troupeau. La Bible s’inscrit dans ce contexte. David est, par excellence, la figure du roiberger,
préfigurant celle du Messie.

Et Jésus, dans l’évangile de Jean, reprend cette métaphore qui, avouonsle, ne nous parle plus beaucoup, et
l’image du troupeau encore moins. Et pourtant… ces trois petits versets, lorsqu’on les sonde d’un peu plus
près donnent à penser et… à vivre !

« Mes brebis écoutent ma voix » … À quoi reconnaîton un proche ? A son visage, s’il n’est pas masqué (!), son profil,
sa manière de se tenir ou de marcher, mais il est un autre indice, plus parlant si j’ose dire, c’est la voix. Quand
on téléphone à un ami ou un parent, on n’a pas besoin de s’identifier, on est reconnu d’emblée ! Et l’on peut
même, parfois, sentir quelle est son humeur ! La voix, en fait, c’est quelque chose de très personnel ; elle
connaît des inflexions, elle peut être bienveillante, douce et tendre ; elle peut aussi manifester des sentiments
moins positifs : on peut se sentir accueilli ou, au contraire, qu’on n’est pas le bienvenu.

La voix que l’on reconnaît est donc signe d’une relation intime, familière, proche. Mais, si l’on reconnaît la
voix d’un présentateur TV, il n’en est rien de son côté. La relation implique une présence en visàvis, une
attention, une connaissance mutuelle qui se vérifie au fil des jours et par laquelle elle s’intensifie.

Moi, je connais mes brebis, dit Jésus. En effet, Jésus ne rencontretil pas les gens ils sont, dans leurs besoins
propres, dilatant leur cœur et leur ouvrant un chemin d’avenir il semblait bouché. C’est pour ces raisons
qu’ il peut poursuivre : « Et elles me suivent ». Bien sûr, dans un premier mouvement, nous pourrions nous montrer
rétifs au côté grégaire et au suivisme suggérés par le texte. Mais le verbe utilisé est plus subtil, il ne s’agit pas
de suivre docilement le maître tels les moutons de Panurge, mais l’accompagner, accorder ses pas au rythme
d’une relation qui se construit dans la proximité des voix propres et évolue avec le temps, faire route
ensemble, devenir disciple, non comme des brebis bêlant d’une seule et même voix, mais heureuses d’être
différentes et de trouver sa place dans ce concert aux résonances multiples.

Et voilà que, dit le texte, le pasteur offre à ses brebis la vie éternelle. C’est une parole bien étrange. Tout le
monde sait que la mort signe la fin de la vie des brebis comme de la nôtre. Mais c’est tellement gros qu’il
nous faut élargir le regard: le terme utilisé par Jean pour parler de cette vie que Jésus promet n’est pas le
même que celui qui vise le seul fait d’être en vie. C’est un autre mot et il évoque un autre ordre, un autre
registre: qu’estce qu’on fait de cette vie qui nous est donnée? En plus, la vie que je vous donne, sembletil
dire, c’est déjà pour aujourd’hui et elle l’est pour l’éternité. Idée récurrente chez saint Jean. Nous la
retrouvons dans les grands récits de Nicodème ou de la Samaritaine. Si par notre naissance nous accédons
une fois pour toutes à la vie, il nous faut naître et renaître sans arrêt à la vie évoquée par Jean, la vie déployée
en plénitude.

Mais quelle plénitude ? L’extrait des Actes lu ce matin peut nous éclairer. Paul et Barnabé sont rejetés des
synagogues et pourtant, dit le texte, « ils étaient remplis de joie et d’Esprit Saint« . Pour eux, le message reçu de
Jésus vaut plus que tout, plus même que leur vie, menacée pourtant. La joie est le fruit de cette vie ancrée
dans l’engagement à la suite du Ressuscité.

Une autre clé nous est apportée par l’image de l’Agneau dans l’Apocalypse. Un livre difficile, une image
devenue quelque peu inaccessible et pourtant pierre d’angle de notre foi. Le Christ, l’agneau immolé et
vainqueur, conduit « aux sources des eaux de la vie« , comme le montre si bien le retable de « L’Agneau mystique« 
de la cathédrale SaintBavon à Gand. Avec le Christ, en effet, les perspectives sont renversées: le berger, en
consentant à donner sa vie pour ses brebis, est appelé à devenir agneau. Et comme nous sommes tous
appelés à être bergers les uns des autres, nous sommes tous invités à devenir agneau à notre tour. C’est bien
le chemin de la vie, de la vie éternelle. Il n’y a que l’amour qui compte, un amour désarmé et vulnérable.

Et qui s’exprime non pas par des paroles ou avec des discours, mais en acte et en vérité, comme dit saint
Jean ailleurs. La vie éternelle qui nous est promise prend racine ici et maintenant dans le quotidien des jours.
Cette bonne nouvelle confirme notre expérience: c’est lorsque nous aimons que nous sommes heureux et
que nous avons le sentiment fugace, mais combien précieux, de goûter déjà à quelque chose qui s’apparente
à l’éternité.

Amen.

MariePierre Polis

Lectures de la messe :
Ac 13, 14.4352
Ps 99
Ap 7, 9.14b17
Jn 10, 2730

Retransmission radio à réécouter :
https://www.cathobel.be/2022/05/messe-du-4e-dimanche-de-paques-c-2/

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