31082025

C’est un jour de sabbat et Jésus est invité à un repas dans la maison d’un pharisien et on l’observe. Que va-t-il faire ? Tout commence par un regard et lui-même aussi regarde les gens et il voit comment ils se placent, comment ils cherchent leur place dans le repas et quels sont les invités.

On peut remarquer, d’après ce que dit le texte, que Jésus ne dit pas à certains des invités : quel vantard tu fais à te pousser dans les premières places. Il ne juge pas mais raconte une parabole et je me demande pourquoi. Plutôt que d’évaluer s’agirait-il pour lui d’ouvrir un questionnement. Mais lequel ? Je remarque que dans les paraboles que Jésus raconte il est souvent question d’invitation et d’invités. Mais pourquoi ? Il est souvent aussi question chez lui de la place, prendre place, de ceux qui sont en bonne place, de ceux qui n’ont pas leur place…

Ne serait-ce pas un certain regard sur la vie qui est en jeu ? Que la vie, la vie bonne ne se conquiert pas comme les premières places d’un buffet froid ou d’un bus aux heures de pointe. À tout miser sur la compétition, sur l’esprit de concurrence et de rivalité, on risquerait de passer à côté d’une certaine grâce. Et si le cœur de la vie comme invitation, hospitalité, communion était à préserver, à sauvegarder, à sauver… ? Par les paraboles, Jésus raconte des histoires. Et si dans les histoires qui nous arrivent au long des jours, quelque chose de Dieu et de son Royaume se  racontait et nous faisait signe ?

La première observation, où il est question de la place que l’on prend, voudrait nous relancer vers un déplacement du regard. Tu es invité. Dans ta vie, vas-tu mettre toute ton énergie à te battre pour ta place et ton image ? Dans ta vie telle quelle est, accueille plutôt la nouveauté capable de te faire monter vers plus de vie. Peut-être que l’effort mis sur la place à conquérir et à tenir et sur l’image à défendre obscurcit le regard et empêche de voir ou d’entendre. Il y a dans tout l’Évangile une source de guérison de l’aveuglement et de la surdité par rapport à ce qui fait la nouveauté du monde, sa résurrection.

La seconde observation de Jésus porte cette fois sur la place que l’on donne. La manière de Jésus, nous le savons, est de donner de la place à ceux qui n’en ont pas. Il vient, dit-il, chercher ce qui est perdu. Il mange avec les pécheurs. Les aveugles et les boiteux de la vie, il va les chercher aux carrefours. Il met ainsi en œuvre une dynamique de non-exclusion. Notre regard est à nouveau déplacé. Si le Royaume vient par la non-exclusion, il faudrait voir ceux que nous ne voyons pas, voir au-delà de notre regard habituel et conventionnel. Au-delà de ce qui est « politiquement correct », pourrait-on dire. Dans notre monde tel qu’il va, il peut y avoir une résistance, une résistance à déplacer, à changer les places, à prendre les choses en sens inverse.

L’Évangile appelle à cette imagination, à cette invention où l’on déplace ce que l’on a toujours fait. Pour voir si… Qu’est-ce qui se passe hors du cercle restreint où je suis ?

« Cela te sera rendu à la résurrection des justes ». La résurrection du monde commence maintenant. Quand les histoires de ces paraboles font leur chemin en nous et inaugurent un déplacement… Quand nous prenons en nous la nouveauté qui renouvelle notre regard. Quand les paraboles nous entraînent ailleurs…

Frère Hubert

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