13042025

Aujourd’hui, j’attire votre attention sur un acteur un peu particulier du texte évangélique que nous venons d’entendre et que nous avons mis en œuvre à notre façon :  l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem.  Je pense à un personnage discret mais sans qui quelque chose d’essentiel nous échappe :  Eh oui bien sûr, vous avez deviné, c’est l’âne, l’étrange monture que Jésus a choisie pour cet événement crucial.

Jésus n’a pas opté pour le cheval.  Le temps du cheval fait désormais place à celui de l’âne.  Le cheval, c’est le déchaînement de la passion vigoureuse, puissante, irrésistible.  Le cheval, c’est la force militaire par excellence, il symbolise la guerre, il exprime la colère[1].  Il est l’animal du combat spirituel, révélateur des secrets de notre être à affronter, à mesurer, à vaincre et à domestiquer.

L’âne, c’est celui qui vient après.  Il représente la paix, et même le repos :  ce qui en hébreu est un autre nom du Messie.  L’âne révèle une autorité d’une autre nature que la pure force.  Un monde différent s’ouvre donc avec lui.

L’âne est doux, mais pas sans caractère !  Il est têtu, dit-on.  N’est-il pas plutôt prudent ?  Il sait mesurer le poids de la charge qu’on lui demande de porter.  Il sait aussi déterminer le temps :  il connaît sa force et est conscient de la longueur du chemin qu’il peut parcourir.

C’est l’animal de l’écoute.  Ses oreilles sont elles le signe de son ignorance ou au contraire de son ouverture ?  N’est-il pas capable de saisir ce que l’homme n’a pas su entendre ?  Comme l’ânesse de Balaam, dans le livre des Nombres[2], qui a vu l’ange menaçant envoyé pour tuer son maître ?

C’est l’animal du fardeau.  Pour la tradition, cela signifie qu’il prend la charge de la Torah, de la Parole divine, qui ouvre le monde à son sens, à son horizon messianique, à son histoire, à la nouvelle création à quoi elle donne naissance, en un mot, à sa fécondité.  Mais si c’est lui qui porte le fardeau, cela veut dire que nous, nous sommes entrés dans le temps du repos, autrement dit de l’étude, de la rencontre avec cette Parole qui donne vie, de la rencontre réconciliée avec nous-mêmes, et enfin de la rencontre avec Celui qui dit au cœur du cœur de chacun, les mots surprenants et redoutables parfois, de son amour infini.

Notre roi vient, monté sur un âne, sur le petit d’une ânesse.  Que nous dit-il ?  « Venez auprès de moi, vous tous qui peinez… et je vous donnerai le repos…  Oui, mon joug est suave et mon fardeau léger[3]. »  C’est à dire :  mon enseignement est… parfumé ( !)[4], et ma Torah, facile. En somme, j’ai l’honneur de vous annoncer que la monture choisie par Jésus pour son entrée dans Jérusalem -l’âne, le petit d’une ânesse-, eh bien, désormais ce petit âne, c’est… nous. !

Frère Etienne

Lectures: Lc 19, 28-40 ; Is 50, 4-7 ; Ph 2, 6-11 ;  Lc 22, 14 – 23, 56

————————————————–

[1] Cfr Jean-François Froger et Jean-Pierre Durand.  Le Bestiaire de la Bible.  2dition DésIris, Méolans-Revel 1994.  ISBN 2-907653-22-9.  Pages 260 à 266.

[2] Nombres 22, 23

[3] Matthieu 11, 28-30

[4] Etienne Métenier.  Les quatre évangiles, traduction de la Vetus Syra.  ISBN 979-10-306-0568-6.  Matthieu 11, 28-30 ; note B page 66

© 2025 - Monastère Saint-Remacle de Wavreumont

Nous suivre :  -